Une origine moyenâgeuse
La rumeur va bon train au village en ce milieu du XIIIème siècle… Il se dit qu’un abbé de Condom, Montassin de Goalard, souhaite acheter des terres et construire un château dans le village. Le site convoité est stratégique, à moins de 8 km de l’effervescence de Condom, siège d’un clergé puissant et riche, très impliqué dans l’économie et la politique. Le « premier château de Cassaigne », fondation de celui que l’on visite sept siècles plus tard, sera construit en 1247. A l’heure où la France et l’Angleterre se disputent l’Aquitaine, il est protégé par un fossé large de 12 mètres creusé dans le rocher et un pont-levis.
Et la vigne ?
Elle est mentionnée dans différents écrits dès le XIIIème siècle. Les évêques produisent déjà du vin, pour leur propre consommation et pour échanger contre d’autres marchandises. Mais à l’époque, le vin se conserve mal ! Pour préserver la production, il est distillé et transformé en eau de vie blanche, l’ancêtre de l’Armagnac.
Un « joyau de campagne »
Les évêques de Condom sont sous le charme. Le Château de Cassaigne devient leur « résidence secondaire ». Ils sont une vingtaine à séjourner régulièrement dans la bâtisse et à la transformer. Auger d’Andiran (1247-1287) fait reconstruire l’église, Arnaud de Lomagne (1287-1306) fait élever quatre tours. Deux rues sont tracées face au porche de l’église, des maisons sont construites, la population augmente…
Plus tard, Louis de Milon (1693-1734), à la tête de l’évêché de Condom pendant plus de 40 ans, entreprend sa rénovation après plusieurs années de pillages et d’incendies qui ont ruiné les villages de Gascogne. Alexandre César d’Anterroches (1719-1793), quant à lui, fait démonter la toiture du château de Larressingle pour couvrir celui de Cassaigne en meilleur état. Il refait aussi la façade et crée une route vers Condom… Le château fort redevient une résidence d’été.
« Aqua vitae »,
l'eau qui redonne la vie ?
Si l’on en croit l’ouvrage en latin (1310) « Pour garder la santé et rester en bonne forme » de Vital Dufour, médecin et prieur d’Eauze et de Saint-Mont, l’aygue ardente aurait plus de 40 vertus.
« Ça cuit un œuf, ça conserve les viandes crues ; fait disparaître la rougeur et la chaleur des yeux, arrête les larmes de douleur (compresses chaudes avec eau de vie) ; guérit les hépatites si on la boit avec sobriété, les blessures ; l’onction fréquente d’un membre paralysé le rend à son état normal ; elle aiguise l’esprit si on la prend avec modération, rappelle le passé, rend l’homme joyeux au-dessus de tout, conserve la jeunesse et retarde la sénilité ; calme le mal de dent ; enlève les mauvaise senteurs du nez, des gencives et des aisselles ; fait disparaitre les calculs de la vessie ou des reins ; guérit la fièvre quarte pourvu qu’on en prenne avec sobriété de temps en temps ; de même le lépreux s’il en prend quelques fois, sa lèpre n’ira pas plus loin, elle est utile à la femme enceinte si elle en boit de temps en temps modérément ; si l’on oint la tête, elle soigne les maux de tête surtout ceux en provenance du rhume ; si on la retient dans la bouche elle délie la langue, donne de l’audace si quelqu’un de timide de temps en temps en boit… »
Fuite à la révolution
1789, les biens de l’église sont mis à la disposition de l’Etat.
Le Château de Cassaigne est mis en vente le 13 avril 1791 sous le numéro 40 des ventes de biens nationaux, attribué à Justin Thore pour 32 000 livres qui le revendra très vite aux époux Monteils.
Une résidence bourgeoise
En 1840, la famille Duviard décide de raser deux tours d’aspect moyenâgeux livrées aux chouettes et aux hiboux. Elle vend les matériaux issus de la démolition : poutres, pierres, briques, ferrures… Et entreprend une importante rénovation en vue du mariage de sa fille, Alexandrine Duviard avec Paul Clermond Laborde : construction d’un appartement, décoration de l’escalier et des plafonds, tapisseries, ouverture de fenêtres, brûlerie attenante…
Le vieux château devient une résidence bourgeoise qui emploie sept ou huit domestiques. Les générations suivantes poursuivent l’entretien du château, jusqu’à l’actuel propriétaire Henri Faget. Ses grands-parents Maurice Faget (1877-1942) et Jeanne de Laforcade (1885-1963), ses arrières grands-parents Pierre-Henri Faget (1847-1928) et Marie-Louise Laborde (1852-1928) poursuivent l’embellissement du château.
Le dernier intendant des évêques rachète Cassaigne
En 1818, Bertrand Duviard, qui avait été régisseur du château de Cassaigne pour le compte des évêques de Condom, commence à racheter des terres alentours et contracte un emprunt pour acquérir le château à Guillaume Edouard de Morlan. C’est son fils Joseph Duviard (1787-1837) qui en hérite, il crée une distillerie et vend ses eaux de vie jusqu’à Bordeaux et Toulouse.
Etymologie ? Cassaigne vient de « cassanéa, le lieu planté de chênes ».
Le rôle des femmes de Cassaigne ?
- Cécile Escoubès (1762-1840), épouse de Bertrand Duviard, contribue au développement du vignoble.
- Joséphine Barrère (1796-1885), belle-fille de Cécile Escoubès, modernise les installations.
- Marie-Louise Laborde (1852-1928), grand-mère de l’actuel propriétaire, embellit le château et restaure le jardin à l’anglaise, avec des essences exotiques.